14 décembre 2005

Ah, ce Christian, toujours aussi sympa !


Le député UMP Christian Vanneste assume ses propos homophobes

LE MONDE 14.12.05 14h08 • Mis à jour le 14.12.05 14h08 LILLE ENVOYÉE SPÉCIALE

Il évoque avec enthousiasme la remise des médailles de la fête des mères à la mairie de Tourcoing, plaide longuement en faveur de la nécessaire reconnaissance du "mérite" et affirme qu'une société libérale ne saurait se concevoir sans "règles morales communes".
"Je reconnais bien volontiers que je défends une conception politique et sociale conservatrice", résume-t-il avec une certaine coquetterie. Mais surtout, il persiste et signe : oui, d'un point de vue moral, l'homosexualité est inférieure à l'hétérosexualité, affirme Christian Vanneste, qui comparaissait, mardi 13 décembre, devant le tribunal correctionnel de Lille, pour injures homophobes.

Le 26 janvier, quelques semaines à peine après la promulgation de la loi réprimant les propos injurieux ou diffamatoires "en raison de l'orientation sexuelle", le député (UMP) du Nord avait déclaré à La Voix du Nord que l'homosexualité était une "menace pour la survie de l'humanité". "Je n'ai pas dit qu'elle était dangereuse, j'ai dit qu'elle était inférieure à l'hétérosexualité. Si on la poussait à l'universel, ce serait dangereux pour l'humanité", déclarait alors M. Vanneste. Dix jours plus tard, il précisait dans Nord Eclair : "Je critique les comportements, je dis qu'ils sont inférieurs moralement."

Loin de se renier, le député, cité devant le tribunal par SOS-Homophobie, le Syndicat national des entreprises gaies (SNEG) et Act Up Paris, tient visiblement à convaincre les magistrats du bien-fondé de ses conceptions. "Nous parlons d'un problème qui touche le fondement même de l'humanité, explique cet ancien professeur de philosophie qui est aussi l'auteur de la loi contestée sur le rôle "positif" de la colonisation. Dans toutes les sociétés, on a écarté l'homosexualité et l'inceste. Je pense que l'homosexualité n'est pas innée mais qu'elle est acquise au niveau de l'adolescence et donc, qu'elle peut être rééduquée."

Pour les trois associations à l'origine du procès, les propos rapportés par les deux quotidiens tombent sous le coup de la loi du 30 décembre 2004, qui avait créé la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde) et qui punit de six mois d'emprisonnement et de 22 500 euros d'amende les injures envers une "personne ou un groupe de personnes à raison de leur orientation sexuelle". Christian Vanneste peut difficilement arguer qu'il ignore ce texte : lors du débat à l'Assemblée nationale, il s'y était opposé avec ferveur, déclarant déjà dans l'Hémicycle que l'homosexualité est une "menace pour la survie de l'humanité".

Jean-Luc Romero, conseiller régional (UMP) d'Ile-de-France et adhérent du RPR, puis de l'UMP, depuis 1978, se souvient fort bien de cette époque. "Pendant le débat sur le pacs, nous avions assisté à une déferlante de propos homophobes incroyables, raconte à la barre ce témoin cité par les trois associations homosexuelles. Au cours de l'un des défilés, certains manifestants avaient scandé : "les pédés au bûcher". Pendant la campagne présidentielle de 2002, Jacques Chirac avait donc promis une loi pénalisant les propos homophobes. Et après son élection, Nicole Guedj et moi, qui étions alors secrétaires nationaux de l'UMP, avions vu Jean-Pierre Raffarin pour lui demander de faire vite."

Face au tribunal, présidé par Karine Weppe, le conseiller régional de l'UMP ne cache ni sa déception ni sa désapprobation. "J'ai été très blessé par les déclarations de Christian Vanneste, ajoute M. Romero d'une voix blanche. Je suis né à Béthune et j'ai pensé à tous ces jeunes de 13 ou 15 ans qui sentent qu'ils sont homosexuels, qui vivent difficilement leur différence et qui entendent le député de leur circonscription tenir des propos pareils. Aujourd'hui, M. Vanneste nous dit qu'il ne visait pas les personnes mais les comportements. Mais, derrière les comportements, il y a des êtres humains. Quand on est un élu, on ne peut pas parler aussi légèrement."

Pour les avocats, la qualité de député de M. Vanneste, loin de l'excuser, aggrave son cas. "Vous êtes un élu, un professeur, vous connaissez parfaitement le poids des mots, a souligné Me Caroline Mécary, pour SOS-Homophobie. Il convient que les citoyens de notre Etat de droit sachent qu'on ne peut pas dire n'importe quoi." "Une fois que la loi est votée, vous devez, au nom de l'exemple donné à tous les citoyens, la respecter, même si vous l'avez combattue, a ajouté Me Jean-Bernard Geoffroy, conseil du SNEG. Tel est l'honneur d'un député : il s'incline devant le vote majoritaire."

Le ministère public, par la voix de Laurent de Caigny, a requis la condamnation de l'élu. Me Jean-Yves Leborgne, pour la défense, a plaidé la relaxe. Si le tribunal suit l'accusation, M. Vanneste sera le premier citoyen condamné sur le fondement de ce texte qu'il avait tant combattu dans l'Hémicycle.

Jugement le 24 janvier 2006.


A lire également :

L'avis noir sur blanc de différents partis politiques sur diverses questions liées à l'homosexualité.


Aucun commentaire: