Il était certes un peu émeché, et moi un peu endormi, mais j'ai très bien compris ce qu'il me hurlait au téléphone : "Julien, tu me croiras jamais, j'ai retrouvé chouchou !".
Ceux qui suivent ce blog depuis quelques années savent de quoi on parle, là.
Du serieux, du lourd.
Chouchou, c'était le surnom donné à Fanfan, la patronne du Fan-Club, la petite boite karaoké un peu désuete que nous aimions tant à Perrache. Pour l'histoire, c'est Guillaume qui nous avait fait découvrir cet endroit, à l'époque à deux pas de chez nous, vers la rue Mazard, autant vous dire que tout celà ne nous rajeunit pas.
Vous avez été nombreux à suivre dans ces lignes des comptes rendus extraordinaires de ces soirées hors du temps passées là-bas, dans ce temple des années 80 et un peu 90, ou se reflettaient dans les banquettes en sky les images des clips kitch délivrés à l'infini par des lecteurs de Laserdiscs fatiqués.
Tout nus et tout bronzés, Dieu m'a donné la foi, la java de Broadway, l'Envie, mais aussi Total Eclipse of the heart ou encore Baby one more time jusqu'à It's not unusual, tous les standards de cet art majeur qu'est le karaoké, nous les maitrisions sur le bout des doigts, dans une joie simple et vraie, arrosée de vodka coca un peu chères mais tant pis.
Comme toutes les parenthèses heureuses de nos vies que l'on devine malgré tout bien trop tôt éphemères, l'âge d'or "chouchou" a pris fin brutalement le soir ou Guillaume nous a appris que pour la première fois il n'avait pas pu rentrer au Fan-Club puisque l'établissement s'était transformé, sans doute pour mieux s'adapter à la clientèle de Perrache, en ce qu'on appella alors pudiquement pour nous ménager, un bar à hotesses.
Il nous fallu, et ce n'était pas évident, porter le deuil de cette époque insouciante ou l'on pouvait, sur un coup de tête ou de façon complètement préparée, aller pousser la chansonette dans un karaoké à taille humaine ou l'on pouvait sevir sur une bonne quinzaine de titres dans la soirée.
Le temps a passé.
Nos habitudes ont changé.
Certes, les blind tests du Sirius ont apporté d'autres éxperiences nouvelles mais, sans que ce soit forcement élevé à un niveau de conscience, Chouchou et son exigu club nous manquait beaucoup.
Les années passant, tout celà n'était qu'un lointain souvenir auquel on ne pensait presque plus, ou seulement lors de soirées vraiment nazes ou l'on pouvait se surprendre à soupirer, la visage levé vers les étoiles et les yeux mi-clos, en se disant que, quelque part, c'était mieux avant.
Mais un soir de février, JB et Lilian ont décidé de se bourrer la gueule, et c'etait là une sage décision. Ils se sont retrouvés à errer sur les quais de St Jean, là ou on ne va jamais, entre l'Alibi et la Grange aux boucs, le fief des commerciaux à blazers croisés + boutons dorés en chasse de jeunettes. Cette partie de Lyon, on la connait mal, toute cette enfilade de clubs estampillés "hetero-beauf" comme on le dit trop souvent de façon condescendante, nous ne la maitrisons pas, elle nous effraie presque.
Il fallait être dans cet état si particulier, ou la curiosité est pour un rien titillée car teintée d'inconscience, pour flâner sur ce trottoir à la recherche de je ne sais quoi.
Mais ce soir là, JB avait rendez vous avec le destin, rendez vous avec la vie.
Lionel, le mari de Fanfan, se tenait là, devant un établissement orné de la fameuse enseigne lumineuse karaoke avec le perroquet Pioneer, vestige des années 90.
Lionel et JB se sont reconnus. JB fut alors accueilli comme un roi dans le nouveau chouchou, reçu par une Fanfan radieuse qui, et c'est bien là le plus touchant, se souvenait encore de nous.
"Ah, c'est toi qui chantait tout le temps Tout nus et tout bronzés !..."
Récement rentré de Paris, l'un de mes buts était alors de découvrir cet endroit de rêve.
Hier soir, JB Lilian et moi même nous y sommes rendus. C'était prévu de longue date et l'excitation mélée au tract me rendait tremblant et impatient.
L'un des inombrables écrans, sous l'une des inombrables voutes. En arrière plan, une inatendue composition florale...
J'ai finalement découvert la caverne d'Ali Baba.
Hallucinant !
C'est immense ! le Fan Club fois 10 ! des banquettes à perte de vue, des écrans en veux tu en voilà, 2 bars, 1 régie karaoke entièrement informatisée, une estrade avec 3 micros et leurs pieds, une incroyable cabine fumoir, une plethore de verres, de pichets, un bar extremement bien équipé, moult piliers et voutes... et personne.
Nous étions, perdus dans ce dédale, en tout et pour tout 5 clients, nous 3 et 2 hotesses de l'air de passage.
Au bout de quelques minutes, d'autres clients sont arrivés mais en tout on devait être une vingtaine à tout casser.
Et c'est là que c'est genial.
Un immense club karaoke rien que pour nous ! une dizaine de titres en moins de 3 heures !
Miracle que tout celà me direz vous, et je ne peux qu'y souscrire.
Voilà le genre d'évenement qui peut nous faire penser que quelque part une insaisissable force contrôle tout celà.
A la fin de la soirée, j'ai pu chanter, en solo, Nous nous reverrons un jour ou l'autre, une chanson d'Aznavour que Fanfan a trouvé "tres belle".
Nous reviendrons chez Chouchou, c'est promis.
...Le hasard souvent fait bien les choses
surtout si on peut l'aider un peu
une étoile passe, et je fais un voeu
nous nous reverrons un jour ou l'autre, si Dieu le veut...
une étoile passe, et je fais un voeu
nous nous reverrons un jour ou l'autre, si Dieu le veut...
Merci Lilian pour la belle photo !-)
6 commentaires:
l'art majeur du karaoké a enfin revenu dans nos vies, j'étais perdu sans toutes ces chansons de variétés telles "le géant de papier", "la solitudine", même si j'ai été un peu déçu de ne pas avoir eu le traditionnel "j'irai où tu iras"..
Peut-on y chanter "Square Room" d'Al Corley ?
j'peux v'nir ?! j'peux v'nir ?! j'peux v'nir ?!
Comme quoi, il faut croire en la VIE!
Je ne connais pas le catalogue par coeur, mais celà m'etonnerait...
Ceci dit, il est toujours possible de venir avec ta propre bande PBO !
ça ressemble un peu au Banhaus, mais apparemment c'est fermé maintenant...
Enregistrer un commentaire