Article du Figaro
Los Angeles : Armelle Vincent-Arriola (avec Philippe Gélie à Washington.) [10 mai 2005]
La parole est à la défense. Depuis jeudi dernier, c'est un autre Michael Jackson qui est décrit aux jurés de la cour de Santa Maria, en Californie. Un garçon sensible, à part, victime de la cupidité de certains mais si «pur» que des parents n'ont pas hésité à mettre leurs enfants dans son lit.
Dans les prochains jours, Macaulay Culkin, l'ex-petit héros des films «Maman j'ai raté l'avion», est attendu à la barre des témoins pour confirmer ce qu'ont déjà déclaré sous serment deux jeunes garçons et leurs familles. Brett Barnes, 23 ans, a certes dormi avec la star «un nombre incalculable de fois», mais il affirme n'avoir jamais été touché de manière inappropriée. «Absolument pas !», a-t-il répondu à l'avocat de la défense, Tom Mesereau, qui lui demandait s'il avait jamais été abusé sexuellement par le chanteur. «Sinon je ne serais pas ici», a renchéri Wade Robson, un chorégraphe de 22 ans qui séjourna dans le ranch de Neverland lorsqu'il avait 5 ans.
Leurs parents ont fait le voyage d'Australie pour dire à quel point ils avaient confiance en Michael Jackson. «C'est un être très spécial, a expliqué Marie Lisbeth Barnes. Ce n'est pas M. Tout-le-Monde, c'est Michael Jackson. Il est unique, il a une personnalité très pure. Le connaître, c'est l'aimer.» «Il est comme un membre de ma famille, je lui fais confiance avec mes enfants», a ajouté Joy Robson. Des vedettes sont aussi attendues à la barre, notamment l'humoriste Jay Leno et le basketteur Kobe Bryant, pour raconter comment la famille du jeune accusateur a essayé de leur extorquer de l'argent.
Le sort du chanteur de 46 ans, frêle et quasiment ruiné, dépend désormais du pouvoir de persuasion de ces témoins, chargés de battre en brèche dix accusations d'attouchements sexuels sur enfant, d'administration d'alcool et de tentative de séquestration, pour lesquelles il risque vingt ans de prison. La demande d'acquittement pour le grief de «complot», déposée mercredi dernier par ses avocats en raison de «l'insuffisance de preuves avancées par l'accusation» et de «déclarations notoirement contradictoires de certains témoins» a été rejetée par le juge Rodney Melville.
Après le passage dans le box d'une galerie de 85 personnages à la crédibilité inégale, le procureur Tom Sneddon a bouclé son dossier à charge. Selon bon nombre d'experts, les deux derniers mois n'ont pas vraiment renforcé la solidité de son dossier. «L'accusation portée contre Michael Jackson a été soutenue par la pire collection de témoins jamais réunie, estime ainsi Andrew Cohen sur la chaîne CBS. La plupart d'entre eux ont un passé improbable et des motifs véreux pour témoigner contre le roi de la pop. Le procureur a présenté un dossier d'une fragilité mémorable, qui soulève de sérieuses questions sur les tactiques et même l'éthique du ministère public si Jackson est acquitté.»
Que peuvent penser les jurés de témoins tels que Phillip LeMarque, l'ancien cuisinier de la star, ou le garde de sécurité Ralph Chacon, qui disent avoir assisté à des abus sexuels sans jamais les signaler aux autorités, préférant vendre leurs histoires aux tabloïds, avant d'intenter des procès – qu'ils ont perdus – contre leur employeur ? Ou de la mère d'une des victimes, qui a fermé les yeux sur les trente nuits consécutives que son fils de 12 ans a passées dans le lit de Michael Jackson en échange de bijoux et de cadeaux ? Ou encore de la mère de l'accusateur, Gavin Arvizo, qui a avoué avoir menti plusieurs fois et a utilisé le cancer de son fils pour obtenir de l'argent auprès de célébrités ? L'avocat Robert Sanger l'a décrite comme «l'un des témoins les plus malhonnêtes jamais vus dans un tribunal».
D'autres témoins, dans lesquels Tom Sneddon mettait tous ses espoirs, ont finalement bénéficié à la défense. Deborah Rowe, l'ex-épouse et la mère de deux des enfants de Michael Jackson, dont on attendait des déclarations à charge, n'a pas eu de mots assez tendres pour son ancien époux, louant ses qualités de père et accusant les membres de son entourage de se comporter «en vautours» à l'affût de sa fortune. Cynthia Bell, l'hôtesse de l'air de son jet privé, a déclaré qu'elle n'avait jamais vu Jackson offrir du vin à son accusateur, contrairement aux allégations du procureur. «Si les jurés veulent voir Michael Jackson comme un pédophile, ils ont les preuves qu'il leur faut, estime le professeur de droit Laurie Stevenson. Mais s'ils veulent le voir comme un homme traqué par ses anciens employés, des mères étranges et des gens avec des dollars dans les yeux, c'est ce qu'ils verront.»
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